Février est une période de reconnaissance de l’histoire et des contributions des Afro-Américains. Le Mois de l’histoire des Noirs, célébration annuelle, met en lumière l’autonomie économique, l’innovation et la résilience des Afro-Américains dans le commerce et l’entrepreneuriat.
L’existence de ce mois dédié révèle une marginalisation historique de leurs contributions. Son évolution témoigne d’une reconnaissance sociétale croissante de cette histoire. Le Mois de l’histoire des Noirs met en lumière des personnes dont la vision, le courage et la persévérance ont brisé les barrières et influencé le cours de l’histoire.
L’historien afro-américain Carter G. Woodson est à l’origine de cette célébration. En 1926, il lança la Negro History Week pour promouvoir l’histoire des Noirs, alors largement absente des manuels scolaires. Son choix de « la semaine en février » coïncidait avec les anniversaires d’Abraham Lincoln et de Frederick Douglass, figures emblématiques de la lutte pour la liberté et l’égalité
Au fil des décennies, la Negro History Week gagna en popularité et évolua vers le Mois de l’histoire des Noirs sur de nombreux campus universitaires à la fin des années 1960, marquée par le mouvement des droits civiques. En 1976, le président Gerald Ford reconnut officiellement le Mois de l’histoire des Noirs. En 1986, le Congrès désigna officiellement février comme « Mois national de l’histoire des Noirs (afro-américains) ». Cette évolution reflète l’influence croissante de la communauté noire et une reconnaissance sociétale plus large de l’impact de l’histoire des Noirs.
Woodson fonda également, l’Association for the Study of Negro Life and History (ASNLH), aujourd’hui Association for the Study of African American Life and History (ASALH), pour mettre en lumière les contributions des Afro-Américains et garantir que leur histoire soit étudiée et valorisée. Il ne s’agissait pas seulement de commémorer des individus, mais de souligner les réalisations collectives de la communauté noire.
Rosa Parks, en refusant de céder sa place dans un autobus en 1955, devint un symbole de la lutte pour les droits civiques et déclencha le boycott des bus de Montgomery. Maya Angelou, poétesse, écrivaine et militante, a captivé et inspiré des générations avec ses œuvres. Son autobiographie, « Je sais pourquoi chante l’oiseau en cage », est un récit poignant de son enfance. Le Mois de l’histoire des Noirs célèbre également les leaders, artistes, entrepreneurs et militants contemporains qui perpétuent cet héritage, comme Oprah Winfrey, Lebron James, Ava Duvernay et Ta-Nehisi Coates.
Outre Carter G. Woodson, d’autres figures fondatrices ont joué un rôle essentiel, comme W.E.B. Du Bois, sociologue, historien et militant, et Arturo Schomburg, collectionneur dont la collection constitua la base du Schomburg Center for Research in Black Culture.
Le Mois de l’histoire des Noirs a connu une évolution significative, intimement liée aux grands mouvements sociaux de l’histoire des États-Unis. Les années 1960 et 1970, marquées par le mouvement des droits civiques, virent une intensification de la lutte pour l’égalité, avec des leaders comme Martin Luther King Jr. et Malcolm X. Le Mois de l’histoire des Noirs devint un outil puissant pour sensibiliser aux injustices et mobiliser la communauté noire. Les années 1990 virent une institutionnalisation croissante du Mois de l’histoire des Noirs, avec son intégration dans les programmes scolaires et les médias. Les années 2020 ont été marquées par les mouvements Black Lives Matter et la prise de conscience de la nécessité de décoloniser les récits historiques. Le Mois de l’histoire des Noirs est devenu un moment de réflexion critique sur les inégalités raciales et la nécessité de repenser l’histoire à travers le prisme de la diversité et de l’inclusion.
Bien que né aux États-Unis, le Mois de l’histoire des Noirs a influencé d’autres pays. Au Royaume-Uni, il met l’accent sur l’histoire coloniale britannique et les contributions des communautés noires à la société britannique. Au Brésil, le Dia da Consciência Negra (Jour de la conscience noire) est célébré en commémoration de la mort de Zumbi dos Palmares, leader de la résistance à l’esclavage.
le Mois de l’histoire des Noirs, est également comparée à d’autres initiatives, comme le Mois de l’histoire hispanique, qui partage des similitudes dans son objectif de célébrer l’histoire et la culture d’un groupe ethnique spécifique. Cependant, il existe des différences importantes entre les deux célébrations, le Mois de l’histoire hispanique mettant l’accent sur les contributions des personnes d’origine hispanique et latino-américaine, tandis que le Mois de l’histoire des Noirs se concentre sur les questions d’esclavage, de ségrégation et de discrimination systémique. Cette comparaison permet de mettre en lumière les défis et les opportunités spécifiques à chaque groupe ethnique et de reconnaître la diversité des expériences et des luttes au sein de chaque groupe.
En France, l’absence d’un Mois de l’histoire des Noirs suscite des débats. Certains considèrent que la création d’un tel événement serait contraire aux principes républicains d’universalité et d’indivisibilité, tandis que d’autres estiment qu’il est nécessaire de reconnaître et de célébrer l’histoire et la culture des Noirs en France. Ce débat reflète les tensions entre différentes conceptions de l’identité nationale et de la manière dont la diversité ethnique et culturelle doit être reconnue et gérée.
en 2020, le Mois de l’histoire des Noirs a été célébré pour la première fois dans sept pays africains : le Bénin, le Burkina Faso, le Tchad, la Côte d’Ivoire, les Comores, le Sénégal et le Cameroun.
Les archives jouent un rôle crucial dans la préservation de l’histoire des Noirs. Des documents comme le manifeste de Carter G. Woodson, « The Mis-Education of the Negro » (1933), et les affiches vintages des premières célébrations sont des témoignages importants.
Le Mois de l’histoire des Noirs continue d’être une célébration importante. En 2024, il a donné lieu à de nombreux événements et activités, tels que des expositions, des conférences, des projections de films et des événements communautaires. Aux États-Unis, 85 % des écoles intègrent le Mois de l’histoire des Noirs dans leurs programmes scolaires.
Le Mois de l’histoire des Noirs est confronté à des défis et des opportunités. Tel le risque de « tokenisme », c’est-à-dire la réduction de l’histoire des Noirs à un simple mois de l’année. Les critiques plaident pour une intégration permanente de l’histoire des Noirs dans les programmes scolaires et le récit national. Outre les critiques, le Mois de l’histoire des Noirs offre des opportunités d’innovation et de développement. Les projets numériques peuvent jouer un rôle important dans la diffusion de l’histoire des Noirs, avec des archives en ligne, des expositions virtuelles et des collaborations avec des plateformes comme TikTok et Instagram. Ces initiatives peuvent rendre l’histoire des Noirs plus accessible et interactive, en créant des visites virtuelles, des contenus éducatifs en ligne et en utilisant les plateformes numériques pour partager des œuvres et des histoires.
Le Mois de l’histoire des Noirs n’est pas exempt de controverses, notamment la réappropriation commerciale de cet événement par certaines marques, accusées de « pinkwashing ». Les tensions autour des statues et des symboles du passé sont également liées au Mois de l’histoire des Noirs, avec des débats sur la mémoire collective et la manière dont nous devons commémorer les figures historiques controversées. Ces débats reflètent les tensions entre différentes conceptions de la mémoire collective et la manière dont nous devons gérer les héritages difficiles du passé, en questionnant et en réinterprétant la mémoire collective à la lumière des valeurs et des aspirations du présent.
Le Mois de l’histoire des Noirs offre également des perspectives d’avenir. En célébrant les réalisations des Noirs aujourd’hui, il peut inspirer la prochaine génération à discuter des enjeux contemporains, tels que les inégalités économiques, la violence policière et la discrimination systémique. Il peut promouvoir l’autonomisation économique des Noirs, sensibiliser à la question de la violence policière et contribuer à la lutte contre la discrimination systémique.
Le Mois de l’histoire des Noirs comprend un héritage culturel et patrimonial important. Pour explorer l’influence de ce mouvement sur l’expression artistique : la littérature, essentielle à la promotion de l’histoire et de la culture des Noirs, avec « Beloved » de Toni Morrison et « Between the World and Me » de Ta-Nehisi Coates ; la musique noire, du negro spiritual au hip-hop engagé, moyen de raconter des histoires, dénoncer les injustices et célébrer la culture noire, avec Kendrick Lamar et Beyoncé ; des sites historiques comme le Musée national d’histoire et de culture afro-américaines et les projets UNESCO pour préserver les lieux de mémoire de l’esclavage.
Le Mois de l’histoire des Noirs est un acte de résistance contre l’invisibilisation et l’effacement de l’histoire des Noirs. Ce Mois qui a inspiré le Mois de l’histoire des femmes a, selon une étude, établi que 98 % des Américains connaissent aujourd’hui le Mois de l’histoire des Noirs. Au Royaume-Uni, 60 % des enseignants estiment que le Mois de l’histoire des Noirs a renforcé l’estime de soi des élèves noirs.
En fin de compte, le Mois de l’histoire des Noirs est un outil pour révéler une histoire systémiquement effacée. Il nous rappelle que l’histoire des Noirs est une histoire universelle, une histoire de lutte, de résilience et de triomphe, la lutte pour l’égalité et la justice qui est un combat continu. Pour aller au-delà de la simple commémoration, il est important d’appeler à l’action et de s’engager à collecter les récits oubliés. Comme le dit un proverbe africain, « Tant que les lions n’auront pas leurs propres historiens, les histoires de chasse continueront de glorifier le chasseur. »
Il est temps de donner la parole aux lions et de raconter l’histoire du monde sous toutes ses facettes. « L’histoire des Noirs n’est pas seulement l’histoire des Noirs. C’est l’histoire de l’humanité. »